jeudi 29 novembre 2012

Edward Hopper - Galeries Nationales du Grand Palais (Paris)





C'est l'évènement expo de cette fin d'année. Cette première rétrospective parisienne sur le peintre américain fait grand bruit. Dans les médias d'abord, tant il est difficile de passer à côté, mais aussi dans le coeur des gens. Edward Hopper est apprécié de tous, et le nombre de réservations le prouve, puisque, deux mois avant sa fin annoncée, l'exposition affiche déjà complet (en attendant un éventuel rajout de places ou de séances). Bien sûr, la surmédiatisation y est pour quelque chose, mais le bouche à oreille aussi. Car l'exposition a très bonne réputation. Alors, succès mérité ou popularisme pseudo-artistique? Voici mon modeste point de vue.


Vous vous souvenez quand vous étiez adolescent, que votre groupe favori commençait à avoir du succès et qu'il était récupéré par tous? C'était pénible n'est-ce pas? Hopper, c'est un peu la même chose. On entend plein de critiques sur le peintre en ce moment, simplement parce ce carton annoncé agace ceux qui aimaient Hopper depuis longtemps. De là à boycotter l'évènement? Bien mal vous en prendrait. L'exposition est superbe. A l'image de l'oeuvre, qui sous ces airs si accessibles propose une profondeur d'interprétation impressionnante, selon la vision de chacun. A mes yeux, Hopper est le premier artiste pop, avec cette fausse simplicité apparente. Et se retrouver face à certains tableaux impressionne, au point d'avoir envie d'y rester des heures. On pourrait se poser là, à décortiquer son travail, ou juste à s'évader dans ces séquences cinématographiques figées, mais qui suggèrent énormément. La visite en tout cas permettra, comme souvent au Grand Palais, une découverte chronologique, avec une première partie sur la formation de l'artiste et un regard sur ceux qui l'ont inspirés. La deuxième nous montre ses oeuvres les plus connues, et surtout les plus matures, le véritable univers d'Edward Hopper en fait.




Le début de l'exposition est original. Dans cette première partie, on voit davantage le travail de ses pairs que celui d'Edward Hopper. Elle permet de voir l'évolution de son travail, de ses débuts, très influencé par les impressionnistes ("Chop Suey", ci-dessus, fait penser à Degas), à ses études sur des sujets précis, comme les limites de la civilisation, les maisons, ou encore son obsession pour la lumière du soleil. Une salle est dédiée à ses gravures, très réussies, qui étaient, avec ses illustrations, sa seule source de revenus au début de sa carrière. Si la suite de son oeuvre a beaucoup influencé le cinéma (Hitchcock, notamment), on a déjà ici les prémices d'un univers visuel fort, et il serait intéressant de connaître l'influence d'Hopper sur la bande dessinée par exemple, tant certaines planches font penser aux BD des années 60.




La deuxième partie parle davantage aux amateurs puisque l'on rentre dans l'univers connu de l'artiste. Connu mais pas inintéressant car l'évolution est encore présente et le style s'affine au fil des ans. On retrouve un certain classicisme dans les années 30, comme des restes de l'impressionnisme européen, mais transposé dans son pays natal. Puis les années 40 nous offrent ses plus grandes réussites, comme "Nighthawks", son tableau le plus connu, ou "Summertime", mon favori. On commence également à voir la récurrence de certains thèmes, ou de certaines mises en scènes. Son obsession de la lumière du soleil donc, mais aussi ce côté voyeur présent dans beaucoup de ses peintures, représentées par un cadrage ou un angle particulier, par les fenêtres également. Hopper aime également mettre en peinture des femmes, souvent rousses. Ces personnages, en général, sont assez grossiers, mais toujours expressifs grâce au décor dans lequel ils se trouvent, proche de la mise en scène.




Mais la récurrence du peintre américain, c'est bien évidemment la solitude. Avec ces expressions vagues, ces regards dans le vide ou vers l'horizon, on la ressent comme l'élément maître du travail d'Hopper. Les personnages sont soucieux, absents, seuls, même quand ils sont plusieurs. Cette solitude est représentée à la campagne ou en ville, en extérieur ou en appartement. Mais elle est toujours présente, toujours palpable. Et j'ai vraiment trouvé très bonne l'idée, je suppose volontaire, de terminer cette exposition par "Chambres au bord de la Mer", représentant une pièce vide ensoleillée. Comme une conclusion évidente du travail d'Edward Hopper.




Le succès de cette fin d'année n'est donc pas une imposture. Cette rétrospective est une réussite, dans son fond comme dans sa forme. Ces quelques 130 peintures confirment la place à part que peut tenir Hopper dans nos têtes et dans nos coeurs. C'est tout un univers, à la fois réaliste, romantique, cinématographique qui nous embarque et dans lequel nous nous reconnaissons. Le plus européen des peintres américains mérite donc amplement ce succès et je vous inviterais bien à visiter cette exposition à tout prix. Mais ce sera compliqué, je ne vais pas vous mentir. Un très beau moment en tout cas!




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