Il y a musique extrême et musique extrême. Je n'en écoute pas beaucoup, il faut vraiment que le groupe ait de sacrés arguments pour me convaincre. The Dillinger Escape Plan est à classer dans la catégorie des groupes bourrins ultra-techniques, qui nous proposent des morceaux aussi violents que difficiles à assimiler. On trouvera tout de même pas mal de nuances et des parties chantées au milieu de ces structures alambiquées. Alors oui, je sais, c'est la fête des mères, et je suis conscient que ce n'est pas la chronique idéale pour l'occasion. Mais j'espère quand même intéresser certains d'entre vous.
Dillinger peut donc être ultra-violent, comme dans le deuxième titre "Good Neighbor", le genre de morceaux qu'on espèrera comprendre au bout de 5-6 écoutes (si tant est qu'on y arrive pour certaines parties...). On a parfois l'impression d'assister à une séance d'épilepsie musicale. Les tempos sont en général rapides. Ce qui bluffera tout le monde, c'est le niveau technique des musiciens, plus qu'impressionnant. Les 5 musiciens sont à un niveau qui ferait presque passer The Mars Volta pour un groupe amateur. Vu le bazar ambiant, il faut dire que c'était une condition sinequanone pour la bonne écoute de l'ensemble. Même remarque pour la production qui est impeccable.
Les américains savent aussi bosser leurs ambiances et écrire quelques mélodies. Une musique tout le temps violente n'a pour moi aucun intérêt. La violence a de toute façon beaucoup plus d'impact quand elle n'est pas permanente. On appréciera donc la capacité qu'a le quintet à poser quelques mélodies vocales, notamment dans "Farewell, Mona Lisa" (voir la vidéo ci-dessous, en essayant de la regarder jusqu'au bout :) ) ou "Gold Teeth On A Bum". Par contre, la voix nasillarde de Greg Puciato laissera peut-être certains perplexes. Je ne suis personnellement pas fan, mais il assure techniquement, et c'est là l'essentiel. "Widower" montre le goût prononcé du groupe pour le jazz, avec son magnifique piano. L'excellent "Parasitic Twins" nous propose également autre chose, avec des sonorités proches de Nine Inch Nails. Mais finalement, on prendra définitivement plus de plaisir dans les séquences bourrines. Parce que si je veux écouter quelque chose de mélodique, je ne mettrai pas du Dillinger dans ma platine. Mais ces parties plus posées ont le grand mérite de relever l'aspect brutal (comme dans le milieu de "Widower").
En plus d'être extrême, la musique du quintet pourra sembler trop réfléchie. On peut se demander comment ils peuvent nous pondre aussi facilement des riffs qui ressemblent à des équations mathématiques. Mais on est malgré tout séduit. Parfait défouloir, on a juste affaire ici au haut du panier de la musique bourrine. Après, c'est une question de goût. Déjà moi, je n'écouterai pas Dillinger tous les jours, d'où une note correcte mais pas exceptionnelle pour un album de cette qualité (les amateurs du genre pourront rajouter 2-3 points à celle ci). Dans tous les cas, je ne le conseillerai pas comme cadeau de la fête des mères, ça c'est sûr!
Le 64ème festival de Cannes vient de se terminer, et en grand amateur de cinéma, je ne vous cache pas que j'ai tous les ans du mal à me passionner pour cet évènement. Je le suis, mais je n'arrive pas à entrer dans l'univers de la croisette. Et selon le jury, il faut bien reconnaître que les palmarès sont parfois douteux. Chacun ses goûts cependant... Je n'ai bien sûr pas vu le Malick nouveau, lauréat de cette année, mais j'ai eu envie de vous faire part de mon Top 5 des meilleures Palmes d'or de tous les temps:
- 5: "Sailor & Lula" de David Lynch: Laura Dern et Nicolas Cage file le parfait amour... ou presque... Même si l'amour est un thème présent dans la plupart des films de David Lynch, il tient vraiment le rôle principal dans ce road-movie romantique, mais tout de même bien déjanté. Loin d'être son meilleur film, quand même agréable à voir..
- 4: "Le Pianiste" de Roman Polanski: à la fois une réflexion sur le rapport à l'art et sur la nature humaine en temps de guerre. Adrien Brody survit comme il le peut, notamment grâce à ses talents de musicien. Vraiment émouvant.
- 3: "Apocalypse Now" de Francis Ford Coppola: l'éternel débat pour un film de guerre est son réalisme. Personnellement, je suis plus un amateur d'ambiances et ce film en est rempli. On ressent la moiteur du Vietnam et on plane avec les personnages perdus dans leurs doutes et leur fatigue. Plus qu'un film de guerre, "Apocalypse Now" devient un voyage irréel dans les tréfonds de l'âme du capitaine Willard.
- 2: "Barton Fink" de Joel et Ethan Cohen: l'histoire d'un écrivain qui rencontre le succès à New York et qui est recruté par Holywood pour écrire des scénarios. L'angoisse de la page blanche et un voisin quelque peu envahissant le pousseront tout doucement vers une profonde crise existentielle, à deux pas de la folie... Peut-être le meilleur film des frères Cohen, avec un superbe duo Turturro - Goodman.
- 1: "Pulp Fiction" de Quentin Tarantino: on oublierait presque que ce monument du cinéma a reçu la Palme d'or. Un peu ironique pour une oeuvre qui tire sa source de la culture pulp, loin loin loin des paillettes de Cannes et de la hype qui l'entoure. Une raison de plus pour lui donner la place d'honneur de ce Top 5!
Plan B, c'est Ben Drew, un rappeur anglais qui s'est fait remarqué en 2006 avec un premier album qui lui a valu le surnom d'"Eminem anglais". Ce 2ème opus est une sorte d'album concept, qui raconte l'histoire de Strickland Banks, un chanteur soul accusé d'un crime qu'il n'a pas commis. Il sera même prochainement adapté au cinéma, joué et réalisé par Mister Drew himself.
Dès le 1er titre, "Love Goes Down", on se retrouve en pleine motown. De la vraie soul, du vrai Rn'B, pas le truc surjoué et indigeste de maintenant. L'approche est plus moderne, dès "Writing's On The Wall". On sent un énorme respect du style originel doublé d'une volonté de rester dans notre époque. L'approche d'un artiste intellligent en fait...
Ben Drew reste un rappeur, les interventions rap sont savamment dosées ("She Said") et arrivent toujours au bon moment. Elles sont importantes pour l'aspect plus moderne, mais aussi pour le rythme général de l'album. Un petit mot sur "Stay Too Long", véritable bombinette fusion, qui est la meilleure chanson du genre qu'il m'ait été donné d'entendre depuis longtemps!
Fabuleux rappeur, il est aussi un merveilleux chanteur. Cet album est en grande partie chanté, et la voix de Ben fonctionne à merveille et colle parfaitement au style soul. N'oublions pas que le monsieur est anglais, vous pouvez donc compter sur de superbes mélodies. Comme à l'époque, les rythmiques à base de cuivres et de cordes sont parfaitement arrangées ("The Recluse").
Cet album nous prouve donc qu'il ne faut jamais sous-estimer un rappeur! Pour ceux que la vraie soul laisse insensible, l'album semblera peut-être lisse de prime abord. Pour les fans de black music, il aurait de quoi devenir un standard de par son respect pour l'esprit originel ainsi que sa modernité. Pour ceux qui se situent entre les deux comme moi, la qualité d'écriture ne pourra que séduire. Dans tous les cas, Ben Drew, en tant que chanteur, rappeur, ou compositeur, mérite le respect!
Dans la petite ville de Charlestown, le crime est un peu une histoire de famille. Comme leurs pères, Doug MacRay (Ben Affleck) et ses potes sont des experts braqueurs. Lors du braquage d'une banque, ils prennent la directrice en otage et découvrent plus tard que celle-ci habite dans le même quartier qu'eux. A force de la filer, Doug va en tomber amoureux. Il devra alors décider s'il veut ou non changer de vie.
Il ne faut pas longtemps pour entrer dans l'ambiance du film. Après une scène d'ouverture réussie, Ben Affleck pose ses personnages dans le cadre de cette petite ville où le destin semble fort limité. Au milieu du meilleur ami qui peut péter un plomb à tout moment (Jeremy Renner), de l'ex un brin camée (Blake Lively) et du parrain de l'organisation locale (le Fleuriste, joué par le regretté Pete Postlethwaite), il joue le gentil méchant qui s'attache à son otage (la discrète mais efficace Rebecca Hall). Ce syndrome de Stockholm inversé ne tombe jamais dans le too much et l'idylle fonctionne très bien. De la même façon, les scènes d'action, tournées avec un grand réalisme, donne le rythme nécessaire au déroulement de l'histoire. Ben Affleck confirme, après "Gone Baby Gone", tout son talent de réalisateur. La mise en scène est tour à tour dynamique et intimiste, toujours réaliste, et fonctionne parfaitement. Les personnages n'ont rien de foncièrement original mais sont bien écrits et bien interprétés. Même remarque pour le scénario, adapté du roman "Prince of Thieves": classique mais plus qu'efficace.
"The Town" est un bon polar, emprunt d'une douce noirceur qui saura nous enivrer. Il compense un certain classicisme par un sans faute dans l'interprétation, la mise en scène et l'écriture. Quant à Affleck, souvent critiqué (à tort?) pour son jeu, il prouve définitivement qu'il est un très bon réalisateur.
Il parait que l'ennemi public numéro 1 est mort. Pas de polémique, pas de réjouissance non plus, juste l'occasion de parler du terrorisme au cinéma. Ca vous fait penser à quoi vous? Voici mon top 5!
- 5: "Angles d'Attaque" de Pete Travis: le président des Etats-Unis est à Salamanca en Espagne, il est victime d'un attentat lors de son discours sur la Plaza Mayor. Un bon petit film chorale aidé par un bon casting (Sigourney Weaver, Forest Whitaker, ...).
- 4: "L'Armée des 12 Singes" de Terry Gilliam: le thème du terrorisme est abordé par l'intermédiaire de ce groupuscule que sont les 12 Singes, et bien sûr par l'épidémie. Le terrorisme bactériologique est peut-être encore plus terrifiant que les bombes...
- 3: "Fight Club" de David Fincher: comme "L'Armée des 12 Singes", le terrorisme n'est pas le thème principal de "Fight Club". En oeuvre richissime, il pose également des questions sur les idéologies et leurs possibles répercutions. Et la scène finale ne peut plus être vue de la même façon après les attentats du 11 septembre...
- 2: "Arlington Road" de Mark Pellington: un bon film avec l'une des meilleurs fins que je n'ai jamais vu! Avec Jeff Bridges en citoyen moyen et Tim Robbins en voisin cachottier, voici le film ultime en matière de terrorisme à petite échelle. Et cette fin... Le genre de fin que l'on n'oublie pas!
- 1: "Une Journée en Enfer" de John McTiernan: bien que ce 3ème volet des aventures de John McClane ne soit au final qu'une simple histoire de vengeance, il est encore plus hanté par la marque du terrorisme. Il suffit de regarder la scène d'ouverture pour s'en convaincre. Pour la petite anecdote, le sous-titre sur les affiches fut à un moment... "It's boomtime in the big apple!"...
Difficile de chroniquer un album comme celui-ci. Indépendant, exigeant, pas vraiment accessible, qui vais-je intéresser avec ces quelques lignes? Alors quoi? Doit-on le laisser dans son carcan élitiste ou le partager quand même? Tout ça ne veut finalement rien dire donc oui, ce disque mérite d'être chroniqué et d'être écouté par tous.
Quatuor à l'époque, devenu trio depuis peu, Battles est constitué d'anciens musiciens de Don Caballero, Helmet, Prefuse73 ou Tomahawk, des groupes qui ne parleront qu'aux plus connaisseurs d'entre nous, mais assez cultes dans leur famille musicale. Pas le genre de groupes en tout cas qui cherchent à faire la même musique que tout le monde. Et Battles ne déroge pas à cette règle. Entre le post-rock et le progressif, les new-yorkais se distinguent par des compositions riches, complexes et ambiancées, auxquelles s'ajoutent des touches électroniques, des claviers et des délires cartoonesques ("Atlas"). Dit comme ça, ça ressemble à un beau bazar! Alors comment vous donner envie d'écouter ce disque...
Peut-être en vous disant qu'il y a des chances pour que vous n'ayez jamais rien entendu de pareil. Il y a de quoi être surpris une dizaine de fois par morceaux. Et même si certains titres durent 7-8 minutes, c'est tout de même pas mal! On est ici en présence d'une façon différente d'approcher la musique. Les instruments sont exploités autrement, les voix ne ressemblent plus à des voix, les mots ne sont plus des mots. On est dans un autre monde, où tout sonne différemment.
Du coup, la question est: aurez-vous le courage et la patience de rentrer dans l'univers de Battles? Nous ne sommes pas ici dans un songwriting au sens classique du terme. Tout est bien sûr possible, mais il me semble inapproprié d'écouter cet album d'une oreille distraite en faisant la vaisselle, ou de se mettre 3 ou 4 morceaux parce qu'il nous reste une demi-heure avant de partir travailler...
Ok, je sais, je suis peut-être en train de vous casser l'envie de vous plonger dans ce disque. Finalement, ce "Mirrored" n'est pas élitiste, il risque juste d'être un peu le reflet (ha ha!) de notre rapport à la musique. Je ne vous dirai pas non plus qu'il est accessible, ce serait mentir. J'essaie juste de vous faire comprendre que cet album a assez de qualités pour qu'on lui accorde un peu de temps, et si possible une écoute attentive.