samedi 12 avril 2014

"La Contre-Basse", Théâtre de Paris - Salle Réjane





Je me lance. C'est une première, je m'essaie à la chronique théâtrale. Comme d'habitude, ce sera sans prétention, je ne suis pas critique professionnel. Et même si je vends des places de théâtre depuis 10 ans, et que c'est loin d'être ma première pièce, je ne peux qu'avouer que je ne m'y connais moins qu'en musique ou qu'en cinéma. Pas grave, j'espère vous en parler au mieux, et vous donner envie d'aller voir cette "Contre-Basse", portée, soutenue même, par Clovis Cornillac. 


Cela faisait longtemps que je n'étais pas allé au théâtre, mon emploi du temps chargé ayant souvent eu raison de mon envie de rentrer tard de Paris à chez moi. Mais cette fois-ci, je n'ai pas voulu laisser passer cette occasion. Je voulais vraiment voir cette nouvelle adaptation du texte de Patrick Süskind, longtemps interprété par Jacques Villeret. Direction donc la salle Réjane, petite salle rattachée au Théâtre de Paris, où, sur scène, trône déjà l'imposant instrument. L'autre moitié du binôme arrive et commence la partie magistrale du texte. Le personnage présente le monde de la musique classique, le rôle du contrebassiste en tant que musicien, son positionnement dans l'orchestre, qui mènera vers ses premières plaintes. Le côté ingrat de cet instrument volumineux et peu gracieux tisse des liens avec le mal-être du personnage. Sa solitude en est le point central, cette solitude qui tend vers la folie par moments, qui fait parler tout seul, ou pire, à d'autres quand on est seul. L'écriture est parfaite, à la fois subtile et fluide, le nombre de thèmes ou d'anecdotes divertit, là où le ton, du rire aux larmes, montre la richesse de la plume de Süskind. Et ce que l'on pense du personnage le prouve mieux que tout. Il nous fait marrer, il nous émeut, parfois au même moment, et, surtout, il tire de nous autant d'empathie que de détachement. Au point que l'on en vient même par moments à se demander si l'on n'a pas, après tout, l'instrument que l'on mérite. 




Pour jouer tout ça, il fallait un comédien à la hauteur. Je n'avais pas d'a priori sur Clovis Cornillac en tant qu'acteur de théâtre, et j'étais curieux de voir sa performance. Je n'ai pas été déçu du tout. Tout n'est pas parfait, il est parfois un peu trop "français" dans son interprétation, mais sa maîtrise du texte (une heure et demi seul en scène, je vous le rappelle) et du panel étendu de sentiments force le respect. Contrairement à l'humour, omniprésent, l'émotion dépend à mon sens beaucoup plus de l'interprétation. Et même si le fait de se reconnaître dans le fond doit aider, j'ai été touché par le personnage et Cornillac y est pour beaucoup. Il donne même l'impression d'évoluer physiquement au cours de la représentation, il quitte la scène les cheveux en pétard et le regard fou, alors qu'il y était entré calme, posé et le brushing impeccable. J'aurai aimé voir ce que Villeret faisait du rôle à l'époque, mais je peux vous assurer que Clovis Cornillac est à la hauteur d'un texte d'une richesse imposante, que tout le monde n'aurait pu porter.



Voici donc une bonne pièce de théâtre, où l'écriture de Patrick Süskind, auteur du "Parfum", je le rappelle, et l'interprétation de Clovis Cornillac sauront convaincre aisément. Le thème de la musique n'est qu'un prétexte pour aborder des sujets plus profonds, comme la solitude, la folie, l'amour et même l'alcoolisme. L'heure et demi passe sans problème grâce à un humour omniprésent et savamment distillé. Et l'émotion finit de nous achever et nous renvoie vers nous-mêmes. Du bon boulot, du beau théâtre, drôle et réfléchi.






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